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Liège, dans les années 1970. Un coffret de vingt romans signés Georges Simenon est exposé dans la vitrine d’une bouquinerie. Il attire le regard d’un adolescent passionné de littérature, qui se décide à pousser la porte pour en demander le prix. À l’intérieur, il découvre un capharnaüm et rencontre François, le libraire qui en est l’organisateur.
Pour nous tous qui aimons les livres, la littérature est délassement, plaisir, évasion, apprentissage, drogue peut-être ou consolation, mais elle se superpose à la vie sans la remplacer. Pour François, elle était la vie même.

La lecture est un chemin tout à la fois personnel et sinueux dont le parcours se décline au gré des découvertes. Chaque livre lu marque une étape souvent liée à des circonstances précises, à des personnes qui nous en ont parlé. C'est de cela que nous parle le dernier roman de Marc Pirlet qui se déroule dans le quartier liégeois de Sainte-Marguerite, nous rappelant ainsi son premier roman, le Photographe.
Le narrateur, un jeune homme qui vit seul avec sa mère, mène une existence ponctuée de rencontres familiales . Il découvre les joies de la lecture et se lie d’amitié avec François, un bouquiniste du quartier. Leurs rencontres hebdomadaires, que le jeune homme cache soigneusement à sa mère, sont des moments précieux qui nous permettent de croiser Stevenson, Simenon, Malraux et bien d'autres. Jusqu’au jour où cette belle amitié prend fin, brutalement.
Ce sont ces rencontres qui nous sont livrées, sur le registre de la confidence, que suivent des regards croisés d’autres proches de François, dessinant peu à peu le destin singulier de cet homme.
Marc Pirlet est décidément un auteur rare. Loin des paillettes et du tumulte, il trace son chemin d’écrivain au chevet de l'intime. Comme dans son roman précédent, le Joueur de bonneteau, il puise sans nul doute dans ses propres souvenirs, mais avec une pudeur et une sobriété qui ne font nulle ombre à l’intensité des sentiments réveillés. Grand admirateur de Simenon, Marc Pirlet a depuis longtemps renoncé à l’emphase, aux débordements, aux jugements hâtifs.
Son écriture sobre et finement travaillée est celle des auteurs les plus rigoureux, elle effleure les personnages et se tient à l’essentiel pour explorer sans relâche les méandres de notre complexe humanité.

Thierry Detienne